Alors, j'ai quand même du mal à construire des histoires à message. Le précédent texte tenant plus de la lettre ouverte pour adultes, je suis parti sur tout à fait autre chose. Le problème avec les textes engagés, c'est qu'il est difficile d'être didactique sans être trop donneur de leçons, etc. J'admire toujours ceux qui y parviennent habilement.
Bref, voici donc la nouvelle mouture :

J’ai chaud, j’ai froid. Ca me pique et me gratouille. J’ai mal au ventre, mal au crâne et mal aux poumons quand je respire à fond. Je m’ennuie. Mes autres compagnons lapins sont comme moi : effrayés, apeurés, comme anesthésiés. Nous attendons sans espoir que se déroule notre journée. Parfois, nous obtenons une caresse, un peu de chaleur, de réconfort, mais cela ne dure jamais très longtemps car nos manipulateurs s’endurcissent ou s’en vont.

Ce matin, on me mettra du rouge à lèvres. Pour mon voisin, ce sera de la crème. Un autre sera enduit de gel douche, un autre respirera du produit pour le sol, un autre aura du mascara sur les cils. Différents essais qui causent la même peine. Evidemment, nous n’aimons pas ça, mais nous ne pouvons rien y faire. Nous n’avons connu que cette vie depuis notre naissance.

Quoi, déjà ! La nuit m’a semblé bien courte. Et pourquoi tout ce bruit ? Pourquoi marchent-ils si vite, pourquoi ces cris ?

Ma cage est ouverte rapidement, on me prend et me ballotte. Je ne comprends pas ce qui m’arrive, ce qui nous arrive car mes petits camarades sont également embarqués dans un grand panier. Je ne comprends pas mais entends une fille dire à haute voix : « Ouf, on a réussi, tu te rends compte ! Tu as vu leur état ! »

Une grosse voix lui répond : «Tout ça pour des cosmétiques… alors qu’il existe de nouvelles techniques de test, alors qu’il existe des produits simples et sains qui n’ont pas besoin d’être testés, alors que l’organisme d’un lapin n’est pas le même que celui d’un humain… ». C’est à ce moment que je m’endors….

A mon réveil, on me présente à manger, on me caresse. Une fille me parle doucement : « Ne t’inquiète pas, tout va bien se passer pour toi, tu es avec nous maintenant ». J’aime sa voix, son odeur, ses gestes rassurants. Peut-être vais-je enfin pouvoir vivre calmement ?